3MO Performance : Maître de la transmission



En début d’année, nous avions découvert les locaux et l’activité de BOS Suspension, fournisseur des suspensions de la Toyota Yaris WRC. Cette fois, nous réalisons une visite à distance chez une entreprise basée à Laval, spécialiste des transmissions : 3MO Performance.

Grâce à l’aide de Julien Defoy, responsable commercial et marketing chez 3MO Performance, nous avons pu découvrir cette entreprise française, fortement impliquée en rallye, notamment avec PSA et Alpine, ainsi qu’en rallye amateur.

Ces derniers jours, cette entreprise mayennaise s’est transformée pour participer au combat contre le COVID-19 (voir en fin d’article). 

Peux-tu nous présenter ton entreprise ?

“Notre coeur de métier est le développement de solutions de transmission. C’est une société qui a plus de 50 ans d’âge mais qui a beaucoup évolué ces dernières années. Nous sommes basés sur deux sites de production de 3200m² et 2400m² et un troisième de 1400m² va ouvrir prochainement. Au total, 62 employés travaillent dans l’entreprise avec un bon nombre de pratiquants et de nombreux fans de rallye !

Avant de développer exclusivement des transmissions, l’activité de 3MO se concentrait sur la fabrication de moules pour l’injection plastique automobile, mais cette activité a progressivement disparu depuis la fin de l’année 2007. Dans cette période, Stéphane Rogeon, alors responsable au bureau d’études chez SADEV (spécialiste des boîtes de vitesses pour le sport auto) a racheté l’entreprise pour en faire exclusivement une société développant des transmissions. 

Avec la crise économique de 2008, il a fallu transformer notre métier plus rapidement que prévu car les moules n’intéressaient plus personne face à la concurrence chinoise. On a notamment commencé à développer des boîtes séquentielles pour les amateurs afin de les rendre accessibles. Nous avons des métiers et des compétences divers et variés. La polyvalence est le maître-mot et nos équipes sont douées pour ça : design, FAO, fonderie aluminium, tournage, fraisage avec des machines outils 3, 4 et 5 axes, taillage (fraise-mère et outil-couteaux), électro-érosion (par enfonçage et au fil), rectification (plane, cylindrique et dentures), superfinition avec agrément McLaren F1, assemblage, essais sur banc. Notre service contrôle-qualité a un rôle clé dans notre fonctionnement car 100% des pièces sont traçables dès la fourniture matière. Sans oublier le commerce et le service après-vente. Nous avons fait le choix d’intégrer 100% de la chaîne de valeur à Laval.

Quel a été votre premier gros projet ensuite ?

“Nous avons été choisi pour développer la transmission de la Citroën DS3 R3 sortie en 2008. 3MO offrait une alternative sur ce secteur. Les employés ne connaissaient pas vraiment le rallye mais ils ont appris les codes de la discipline très rapidement.

Pour nous, ce contrat était une énorme opportunité et nous a permis de vraiment nous lancer dans le sport automobile. Pour cela, la présence de trois personnes avec des années d’expérience en transmission motorsport a notamment rassuré pour convaincre PSA de travailler avec nous. Tout s’est très bien passé et la DS3 est devenue la référence du R3 selon moi. La marque 3MO était alors lancée en sport automobile.”

En 2012, PSA vous recontacte pour la Peugeot 208 T16 et la Citroën DS3 R5, mais la réussite n’est pas la même.

“Nous étions très fiers de travailler sur un tel projet. On a mobilisé toutes les ressources de l’entreprise pendant deux ans. Mais tout le monde s’est pris les pieds dans le tapis. La fusion entre Citroën Racing et Peugeot Sport n’a pas aidé. Nous étions sans doute trop jeunes, et en tant que fournisseur, nous n’avons pas fixé les limites nécessaires pour éviter les problèmes rencontrés. On nous a demandé un changement très important à seulement 3/4 mois de l’homologation, c’était le grain de sable dans l’engrenage alors que le développement s’était bien déroulé. Avec le recul, nous aurions du faire les choses différemment mais cela nous a permis d’apprendre plus rapidement que prévu.

On a eu une mauvaise image avec ce projet, malgré les titres nationaux décrochés par la voiture en Irlande, en Allemagne, en Slovénie, au Portugal, en Italie avec Andreucci, et les deux titres de Bonato en France. Le rallye d’Ypres 2016 où Lefebvre et Bouffier abandonnent coup sur coup avec des problèmes de boîte en jouant la victoire, ça reflète vraiment tout le projet. A l’époque, PSA représentait 40% de notre CA et nous étions un peu sur la mauvaise pente.

Suite à ça, nous avons changé complètement de stratégie en re-définissant nos propres exigences. Nous nous sommes centrés sur le produit et avons développé un tout nouveau service clients. On a également avancé sur la mobilité électrique. Tous ces changements ont tous été bénéfiques à tous les niveaux et nos clients en sont aujourd’hui reconnaissants je pense.

On a développé une large gamme de produits avec une dizaine de boîtes de vitesses disponibles. En parallèle, de nombreux pilotes de Coupe de France nous ont fait confiance.

Grâce à ces changements, on a réussi à inverser notre image de marque. Concernant PSA, nous avons eu des négociations pour la Citroën C3 R5 pendant 2/3 mois, mais cela ne s’est pas fait. En R5, nous avons aussi été à deux doigts de travailler avec une autre marque. Pour poursuivre notre développement, nous nous sommes orientés vers d’autres disciplines, car il est vrai qu’on nous a boudé quelques temps en rallye. Même si peu de gens le savent, nous fabriquons également des pièces de transmission pour une des WRC actuelles, au niveau du différentiel central.”

Après PSA, vous avez séduit à un autre constructeur français : Alpine.

“En effet, nous avons débuté en circuit tout d’abord aves les premières Alpine A110 by Signatech. On a fait naturellement la passerelle sur le rallye avec un produit très proche finalement. L’Alpine A110 FRGT a roulé avec de très nombreux pilotes avec plus de 5 000 km d’essais. Lionel Chevalier et tout l’équipe Signatech mène ce projet avec passion ! Tout se passe pour l’instant très bien avec de bons débuts au Touquet, notamment grâce à FJ qui a également un rôle clé dans ce projet. Le programme Alpine marque notre retour avec un constructeur en rallye, c’est une fierté d’avoir su rebondir après les difficultés rencontrées.

Hors rallye, quels sont les autres gros projets chez 3MO ?

“Ils sont nombreux car nous sommes dans toutes les disciplines : Rallycross, Offroad, Endurance, Monoplace, Autocross, et même en Drift où nous clients nous ont beaucoup apporté en expérience !

Le buggy tout-terrain OT3 qui a débuté au Dakar en janvier dernier en remportant 50% des victoires d’étapes. Il est destiné aux pilotes junior de Red Bull et Cyril Despres a également roulé avec au dernier Dakar. Le buggy a été développé dans un temps record et le bilan est déjà ultra-positif.

En circuit, on travaille avec Ligier sur la JS2R, ce qui a nécessité un an de développement. C’est un programme vraiment important pour nous avec une voiture qui se vend très bien et ce n’est que le début. La Renault Mégane TCR est équipée 3MO aussi.

On pousse également sur le sport automobile électrique avec l’Extreme E dont Sébastien Ogier est l’ambassadeur. C’est un projet très bien avancé comme le Projekt E en rallycross avec la société de Manfred Stohl, STARD. Pour ces deux séries internationales, nous sommes fournisseurs officiels. Nous ne jugeons pas la pertinence des choix de l’industrie et donc du sport auto qui en découle. Nous accompagnons nos clients dans leurs projets et nous le faisons toujours avec passion que ce soit pour une motorisation thermique ou électrique.”

Quelle est la spécificité de travailler sur l’électrique ?

“Cela engendre un régime de rotation beaucoup plus élevée en entrée pour les transmissions et il y a des éléments spécifiques à développer comme les joints et les roulements. Il y a beaucoup moins de pièces à réaliser, mais celles-ci sont plus complexes. Avec les régimes de rotation moteur, l’autre point important c’est la capacité de la transmission à supporter des pics de couples en instantanée qui sont très très importants.

En électrique, nous sommes également fournisseurs série de la transmission du Renault Master électrique avec un volume énorme de ventes pour nous. Ce projet a motivé l’acquisition d’un troisième bâtiment dédié aux lignes d’assemblages des réducteurs pour véhicules électrique.”

Quels sont les produits que vous proposez aux amateurs en rallye ?

“On a principalement deux boîtes de vitesses pour les tractions avant. Une destinée aux cylindrées entre 1400 et 1600 cm3 (8000 €) et une autre pour les 2000 cm3 (12 000€ environ). On travaille avec plus de 500 clients en Coupe de France des rallyes. On retrouve notamment Julien Monteil, Bruno Longepe (sur la fameuse 406), Benjamin Cardenas, Romain Brion et bien d’autres. Nous avons une vraie relation avec chacun de nos clients, c’est plus qu’une relation client/fournisseur. Le rallye en particulier et le sport auto en général reste vraiment l’ADN de notre entreprise. Nous sommes dans le baquet le week-end, on sait de quoi on parle !”

Comment l’entreprise travaille durant cette période exceptionnelle ?

“Nous avons fermé dans un premier temps (pendant 3 jours) suite à l’allocution du président. Mais on a réouvert le lundi d’après en appliquant des mesures sanitaires strictes. Nos bâtiments sont assez grands et les employés sont loins des uns des autres, alors que dans les bureaux, ils sont en télé-travail. Toutes les personnes avec des antécédents médicaux sont dispensées de travailler évidemment. Malgré le contexte, nos deux usines fonctionnent à 92%, nous avons suffisamment de charge pour les 8 mois à venir.”

Mais vendredi dernier, 3MO Performance s’est complètement transformé pour aider à combattre le COVID-19.

“En effet. Nous avons été contacté vendredi dernier à 13h00 par un de nos clients basé en Espagne afin de l’accompagner pour la production de respirateurs dans le cadre de la lutte COVID19. Évidemment, nous n’avons pas hésité une minute au regard des enjeux et nous avons commencé le re-design du système de transmission le même jour à 14h00, terminé samedi matin à 6h00. Notre équipe de CAO a réalisé les programmes d’usinage samedi et nous avons arrêté les productions en-cours dimanche soir à 00h00, sur les machines concernées, afin de se concentrer à 100% sur la fabrication de ces centaines de kits qui vont indirectement sauver des vies. Nous ne nous sommes pas posés de question dès la réception de sa demande, cela donne encore plus de sens à notre poursuite de l’activité dans ce contexte particulier et je crois que nous pouvons en être fiers !”





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Pied gauche
Pied gauche
3 années il y a

On a de belles entreprises en France boîtes de vitesse, moteurs, suspension,caisses ect ect

Luk
Luk
3 années il y a

Article très très intéressant.