A.Fourmaux : “À dix secondes près” (Suède)

Plombé par un souci de casque le samedi matin, le Français s’est fait piéger peu de temps après, transformant son week-end, alors prometteur, en une énorme déception.

J’imagine que tu dois être évidemment très déçu de ton week-end. Est-ce que tu vois ça comme un gâchis ?

“C’est en partie vrai, même si c’est un peu difficile à entendre. Nous avions clairement la vitesse pour obtenir un excellent résultat. Nous étions deuxièmes le vendredi midi et quatrièmes le vendredi soir, à moins de 10 secondes de la tête. La bagarre était intense, et les écarts ridicules. Tous les favoris du championnat pouvaient prétendre à la victoire. Je pense que nous avions la vitesse pour rivaliser avec Evans tout au long du week-end. C’est extrêmement frustrant, mais cela peut arriver. Ce qui s’est passé avec mon casque est évidemment regrettable, car cela a tout enrayé et influencé la suite de notre week-end.”

Justement, parlons de cette histoire de casque. Qu’est-ce qu’il s’est passé ?

“On était un peu à la bourre au départ de la spéciale. D’habitude, j’attache mon casque avant le pointage, et là je n’avais pas eu le temps. Donc j’ai mis mes lunettes, mes gants, mon casque, et j’ai oublié de le sangler. Je m’en suis rendu compte à environ six ou sept secondes avant le départ. Alex me dit alors qu’on avait 20s pour partir car sinon c’était la disqualification, donc on n’avait pas le choix de démarrer comme ça.

Donc je m’arrête juste après le départ. J’essaie de mettre la double sangle tout en gardant mes gants, mais ce n’était pas possible, j’étais en galère. Donc j’enlève un gant, je sangle le casque et je remets le gant. On perd plus de 20s. C’est la première fois que ça m’arrive dans ma carrière, et j’espère la dernière évidemment. Ce retard avant le départ s’explique par un petit manque de compréhension avec Alex, et ça se joue à dix secondes près.”

À l’arrivée de la spéciale, tu n’as pas souhaité réagir. Comment te sentais-tu ?

“Je suis vraiment frustré et déçu, et j’ai bien fait de ne pas parler. Parfois, il vaut mieux se taire dans ces situations là. À ce moment-là, je ressentais surtout de l’incompréhension. D’abord, pourquoi je n’avais pas serré ce casque ? Puis, pourquoi on n’était pas dans le timing ? On a déjà pu en discuter avec Alex afin d’éviter que cela ne se reproduise, ça peut être corrigé.”

Comment expliques-tu ce “décalage” avant le départ ?

“C’est une nouvelle voiture avec des automatismes différents à avoir, et tout se joue dans les détails. Dans la Ford par exemple, je pouvais glisser ma veste et mes chaussures très facilement derrière le siège. Avec la Hyundai, il faut ouvrir la vitre arrière, et donc la refermer ensuite. On a l’impression que c’est rien, mais ça change tout en termes de timing.

On va donc travailler pour essayer de gagner du temps entre les spéciales. Il y a des choses intéressantes que je peux amener de mon expérience avec la Ford à ce niveau là.”

Après avoir perdu une vingtaine de secondes, tu signes le scratch dans la spéciale, mais tu pars à la faute dans la suivante.

“On avait envie de rester au contact. J’avais pris 5 roues au lieu de 6, contrairement aux autres, et l’objectif était clair. Je me régalais, j’avais une bonne connaissance des spéciales et j’adorais le profil. On a pu le voir dans la première spéciale de la boucle.

Pour mon erreur, je rentre un poil tard dans le virage par rapport au premier passage, je tape le mur de neige de l’arrière et ça commence à prendre l’avant. Pendant 60 mètres, on a cru que l’on pouvait sortir, j’ai d’ailleurs senti qu’elle revenait à un moment, mais au final, dans un endroit où le mur était un peu moins haut et la neige plus molle, ça m’a attiré le nez et c’était perdu (je ne vais pas utiliser un autre mot, on ne sait jamais).

Mon erreur avec le casque ne se reproduira pas, et j’aurais pu aussi mieux gérer la situation après ça. Comme je l’ai dit, j’ai été le seul à ne pas faire d’erreurs au Monte-Carlo, et cette fois, j’ai été le seul à en faire une.”

Au-delà du résultat final très décevant, tu dois être très satisfait de ta vitesse.

“Évidemment, je suis super content à ce niveau. J’étais vraiment à l’aise avec la nouvelle voiture et j’étais content de mes réglages. J’étais d’ailleurs un peu plus satisfait que mes coéquipiers car je n’avais pas vraiment ce ressenti de sous-virage. J’avais un setup différent d’eux, et c’est un autre point positif pour l’avenir, car la voiture me convient déjà beaucoup et j’ai pu l’adapter rapidement à mon pilotage.

On manque de réussite sur cette épreuve. À nous de rattraper sur les 12 manches restantes. C’est évidemment regrettable, mais on est optimistes pour la suite, il y a de belles choses à faire avec cette voiture et cette équipe. Au moins, nos erreurs n’ont pas changé grand-chose pour le championnat constructeurs.”

Tu marques quand même un point grâce à ton 5e temps dans la Power Stage. Est-ce que tu y croyais ?

“Je t’avoue quand voyant le balayage dans la première du matin, je me suis dit que ce serait extrêmement compliqué de marquer quelques points. On avait tellement ramassé dans la première alors que j’avais vraiment fait une bonne spéciale.

Dans la PS, on perd tout notre temps dans les 3 premiers kilomètres qui n’avaient pas encore été parcourus. Dans l’autre partie, je crois que nous sommes quasiment les plus rapides. On marque 1 point, au moins, on n’est pas venus pour rien.”

Qu’as-tu pensé cette évolution 2025 ?

“Je n’ai encore jamais roulé avec la 2024, et pour le technique, il faudra plutôt parler aux ingénieurs de l’équipe. Mais avec la 2024, les pilotes se plaignaient d’un train arrière trop léger qui ne les mettait pas toujours en confiance. On a eu une grosse évolution par rapport à ça, et maintenant, Ott et Thierry étaient plutôt gênés par le train avant et du sous-virage. Cela montre que le travail a été positif sur l’arrière de la voiture.

On a bien sûr des petits axes de travail à faire sur les différentes évolutions, et on va débriefer tout ça cet après-midi.”

Pour le Kenya, tu vas justement pouvoir rouler avec la 2024 très prochainement.

“On va faire une journée dans le Sud de l’Espagne en recherchant un peu d’altitude. On aura la configuration 2024 car Hyundai voulait vraiment optimiser la fiabilité sur cette manche, et a plus de connaissances sur l’ancienne version.

De mon côté, comme l’an dernier, il faudra avant tout jouer la sécurité et miser sur la fiabilité pour éviter les ennuis. Pour la performance, il faudra s’adapter en fonction des spéciales et bien calculer les risques à prendre par rapport aux conditions.

Il va falloir également comprendre les nouveaux pneumatiques et voir les différences entre les softs et les durs.”

Qu’as-tu pensé des pneus en Suède ?

“Franchement, c’est très positif. Les clous ont bien tenu, même sur les deuxièmes passages, c’était assez impressionnant. Par contre, comme c’était prévu, dès qu’il y avait un peu de neige/loose, ça devenait plus compliqué.”

Ta fin de week-end a été marquée par une convocation devant les commissaires par rapport à un commentaire à l’arrivée de la Power Stage. Qu’en penses-tu ? 

“C’est vraiment bête que la fin du rallye soit gâchée à cause de ça. C’est regrettable de voir que cette pénalité soit au centre des discussions depuis dimanche soir, plutôt que de parler réellement de cette épreuve qui a été fantastique du début à la fin.”

Le prochain rallye au Kenya est dans un peu plus d’un mois. Quel est ton programme à venir ?

“Franchement, je suis bien content de cette petite pause car après un mois de décembre très chargé, janvier a aussi été bien prenant. Je vais pouvoir me remettre d’aplomb, même si j’ai trois jours de développement à venir en Allemagne, plus la journée d’essais en Espagne. Je serai aussi au Touquet lors de la première journée.”