Argentine 2002 : Un scénario fou

Privées d’une des épreuves les plus emblématiques du calendrier, connue pour son public à la ferveur inégalable, nous allons revenir sur l’une des éditions les plus folles du rallye l’Argentine et même du championnat du monde : l’édition 2002.

Parmi les 68 engagés au départ de ce rallye, soit bien plus que lors des dernières années, 17 WRC sont au départ avec six constructeurs : Peugeot, Ford, Mitsubishi, Subaru, Skoda et enfin Hyundai.

Avant ce sixième rendez-vous du championnat, la Peugeot 206 WRC est en grande forme avec déjà quatre doublé au rendez-vous : deux victoires pour Marcus Grönholm, le leader du championnat, et deux autres pour Gilles Panizzi au Tour de Corse et en Espagne. Une troisième 206 brille en ce début de saison avec Richard Burns, deuxième du classement provisoire.

Vendredi matin, Grönholm démontre bien qu’il est l’homme en forme de ce début de saison. En trois spéciales seulement, il s’assoit confortablement à la place de leade. Le finlandais a déjà fait la différence, 18s5 devant Mäkinen, 25s9 sur Rovanperä et 31s7 sur Burns. Les Peugeot sont d’une impressionnante facilité alors que les Ford sont à la peine.

Toujours leader entre la 4 et la 7, Grönholm réalise une incroyable performance dans la spéciale 8, plongée dans le brouillard, collant deux secondes au kilomètre à tout le monde ! Le champion du monde 2000 rentre au parc avec 1min40s de marge sur Mäkinen et 2min1s sur son équipier Burns.

Samedi matin, toutes les cartes sont redistribuées. La 206 WRC de Grönholm connaît des problèmes de pression hydraulique dans la 10 (+50s sur Burns) mais aussi dans la 11 (+36s sur Mäkinen). Après cette spéciale, le finlandais n’a plus que 12s7 de marge sur Mäkinen et 38s7 sur Burns. Les autres, dont Solberg sont à plus d’une minute.

Dans la 15 puis la 16, Mäkinen grapille encore du temps face au leader Grönholm, revenant à seulement 5s6 de son rival avant l’ultime spéciale ! Dans la spéciale de “La Cumbre”, le pilote Subaru entre en transe en collant 8s aux 206 WRC de Gronholm et Burns, s’emparant alors de la tête de l’épreuve pour la première fois depuis le départ, 2s5 devant Marcus.

Dans la dernière du jour, Ascochinga, longue de 28,83 km, les trois hommes de tête évoluent clairement dans une autre catégorie et Mäkinen parvient à garder une marge infime d’une demi-seconde devant Grönholm.

Dimanche, les magiques spéciales d’El Condor et Giulio Cesera vont être une nouvelle fois le théâtre de sacrées empoignades. Dans la première boucle, Grönholm est tranchant, devançant à chaque fois Mäkinen pour reprendre la tête après la 20, 5s5 devant le pilote Subaru. Derrière eux, les écarts sont colossaux avec notamment Burns à plus d’une minute, Sainz et Solberg à plus de deux.

Avec 5s5 de retard à deux spéciales du but, Mäkinen n’a pas d’autre choix que de se surpasser, lui qui vit des débuts chaotiques chez Subaru malgré une victoire rêvée au Monte-Carlo en ouverture de saison.

Dans le seul passage de Cura Brochero, le finlandais prend tous les risques, et même un peu trop. Sa Subaru Impreza s’envole dans une folle série de tonneaux après avoir tapé un talus en sixième vitesse ! La Subaru est catapultée dans les airs et retrouve le sol cinq tonneaux plus tard. L’équipe sort miraculeusement indemne de cette effroyable figure. Par la suite, Kaj Lindstrom va finalement souffrir de séquelles suite à cet accident : “J’ai eu un gros accident avec Tommi, en Argentine. J’ai des problèmes à la hanche depuis. C’était si grave que les médecins m’ont interdit de reprendre la compétition.”

Pour Peugeot et Grönholm, cette sortie est une aubaine, un nouveau doublé 2016 se profile alors qu’il reste 20,65 km. Impressionnantes pendant tout le week-end, les 206 de Burns et Grönholm le sont jusqu’à l’arrivée et s’apprêtent à grimper sur les deux premières marches du podium avant que les commissaires sportifs ne gâchent sérieusement la fête.

Avant le podium d’arrivée, le Lion va rugir de souffrance avec une première mise hors course . Ce dimanche matin, Grönholm a rencontré des problèmes sur sa belle 206 WRC, capricieuse au démarrage. Aidé par son équipe pour redémarrer…mais seulement oralement en sortie de parc d’assistance, Marcus a été exclu, dans l’incompréhension totale. Le finlandais l’a promis, personne n’a touché sa 206, hormis lui et son copilote.

Promu vainqueur, son coéquipier Burns est bien grimpé sur la plus haute marche du podium final, mais sa victoire n’a pas tenu longtemps, la faute à la non-conformité de son volant…trop léger de 20 grammes par rapport à la réglementation.

Plus tôt dans le week-end, Peugeot avait déjà perdu Harri Rovanperä et Gilles Panizzi sur des problèmes techniques.

Jamais dans le rythme des meilleurs, c’est finalement Carlos Sainz qui empoche la victoire, quatre secondes seulement devant Petter Solberg, alors que la troisième place revient à Colin McRae.

Bien conscient d’avoir été largement dominé au cours du week-end, l’espagnol a reconnu que les sanctions infligées aux Peugeot n’étaient pas claires, ni justes.

“Il est évident que le rallye a besoin de clarifier ses règles, expliquait-il. Il est impossible de continuer avec des situations comme celle-là. Il y a eu des fautes semblables par le passé qui n’ont jamais été sanctionnées. Il faut une clarification, de nouvelles règles.”

Abasourdi par une telle situation, Corrado Provera était perplexe à l’arrivée : “Pour être honnête, sur l’histoire de Marcus (Gronholm), la norme est suffisamment floue pour que nous pensions aller en appel. Pour Richard (Burns), en revanche, le problème est clairement indéfendable. Nos systèmes de contrôle ont failli. Je ne vois pas pourquoi on serait victime d’un acharnement. Ou alors, c’est suffisamment bien caché pour que l’on ne s’en aperçoive pas.”

Classement Final