Pendant cette intersaison, et en attendant patiemment la reprise des hostilités fin janvier, il nous semblait intéressant d’évoquer des domaines rarement abordés, et pourtant directement liés à la compétition.
Pour cet article, nous avons souhaité parler du parcours d’un étudiant en école d’ingénieur, rêvant d’intégrer une équipe WRC à l’avenir. À l’ISAT, Ecole d’ingénieurs automobile, aéronautique et transports située à Nevers dans la Nièvre, Kévin Mauconduit est actuellement dans sa troisième année d’étude et construit actuellement son avenir pour travailler dans le sport automobile, et idéalement, en rallye.
Bonjour Kévin. Tu es actuellement étudiant ingénieur à l’ISAT. Quel est ton parcours ?
“Je veux bosser en rallye car je suis un passionné de cette discipline depuis tout petit. À la fin du lycée, je suis tombé sur cette école ISAT mais je n’ai pas été accepté pour la classe préparatoire. Du coup, j’ai fait deux ans de DUT Génie Mécanique avant d’intégrer l’ISAT pour la troisième année. C’était une porte d’entrée pour raccrocher derrière. Il faut savoir que cette école est publique et coûte “seulement” 600€ de frais d’inscription.
Je suis actuellement dans ma 3e année et je suis sur un cycle ingénieur avec un an d’étude pour cette année, avant d’avoir un semestre d’étude et un autre de stage pour les deux dernières années. Certains de mes amis travaillent dans le championnat de France des rallyes mais celui aussi de Belgique.
De mon côté (pour le 1er semestre 2022), j’ai déjà envoyé des demandes aux équipes WRC, WRC2 et WRC3, mais également en F1, F2 et F3. Ces équipes ont beaucoup de demandes à traiter et il y aura plusieurs mois d’attente.”
Tu étudies à l’ISAT mais quelles écoles auraient également pu te convenir ?
“Il y a énormément d’écoles pour bosser ensuite dans le sport automobile. Je pense à celle d’Henri Laurens à St Vallier mais qui est plus destiné au mécanicien pur et dur, c’est à dire aux héros qui réparent entre deux spéciales ! Au début, je me suis forcément intéressé à cette école réputée.
Mais j’étais plus orienté sur le côté scientifique et on m’a incité à me tourner davantage vers le métier d’ingénieur. L’ISAT est devenue alors une évidence.
Au Mans, il y a par exemple une licence développement de véhicules de compétition, mais elle forme surtout des chefs de voiture. Je pense aussi à l’ESTACA à Laval et Paris, ce sont des écoles équivalentes à l’ISAT mais sont privées. Dans mon école, on est 800 au total (étudiants et alternants confondus).”
Au sein de ton école, est-ce que des spécialisations s’orientent plus vers le rallye que d’autres ?
“On peut le dire oui. En fait, il y a trois spécialisations différentes dans mon école. D’abord le MIT (Mécanique et Ingénierie des Transports), c’est ce que j’ai choisi avec l’étude des matériaux et des structures. Il y a également l’EPEE autour de l’énergétique, la propulsion, l’électronique et l’environnement. Cette spécialisation est par exemple très utile pour l’hybridation des WRC. Et enfin l’IRT qui pour le coup, est plus éloignée de la compétition avec des métiers orientées autour de la circulation dans les grands axes.
De mon côté, je préfère étudier les capacités mécaniques des matériau, et en venant de mon DUT, j’ai des compétences différentes de ceux venant de la classe préparation. En stage, j’ai par exemple travaillé sur des matériaux composites pour la F2.”
Avec ta spécialisation actuelle, quels pourraient être tes domaines de travail en rallye ?
“En réalité, on peut sortir de L’ISAT et bosser où on veut en rallye. Tout dépend des spécialisations que l’on choisit. Moi de mon côté je peux bosser un peu de partout sur la voiture, principalement sur la relation avec le pilote ainsi que la mise au point des pièces de suspensions tandis que mes collègues D’EPEE seraient plus portés sur la motorisation et le développement de l’électronique embarquée.
Pour l’instant, je préfère bosser sur une voiture polyvalente, ce qui correspond à du rallye, plutôt que de rechercher à tout prix la performance comme pour une monoplace. Le rallye recherche également la performance mais celle-ci passe par la mise au point d’une voiture efficace sur tous types de terrains et ce, en conditions changeantes. Adapter une voiture à toutes les conditions possibles comme sur un Monte-Carlo, c’est ce qui m’intéresse le plus !
J’ai eu la chance de grandir dans une époque avec 2 grands champions et je rêve vraiment de bosser en WRC. Travailler dans une écurie WRC, c’est la référence, la perfection, ce sont forcément les plus forts dans le domaine. Il faut être à ce niveau de perfection demandé.”
Avant de te voir peut-être travailler sur le terrain en WRC, tu dois mener tes études à bien, et cela passe par ce projet annuel de Formula Student. Qu’est-ce que c’est ?
“Nous avons un projet étudiant à mener en troisième année. À l’ISAT, les projets sont beaucoup liés au sport automobile avec la construction d’un Kart Cross, d’une voiture de rallye 100% électrique et de la Formula Student, une compétition historique internationale. Il y aussi d’autres projets comme L’ISAT kart team (karting), l’eco-marathon, la moto électrique (EMI), IsatFly (avion) ou encore le petit nouveau “H2Y” qui est prometteur avec un fourgon HY à Hydrogène.
De mon côté, j’ai choisi la Formula Student car c’est une formation reconnue de tous et qui est recherchée par certaines équipes ensuite. En 1 an, il faut concevoir une mini Formule 1 (un terme qui résume bien, mais on est assez écarté de ça en philosophie) et nous affrontons d’autres écoles françaises mais également étrangères. On ne compte pas nos heures, il faut travailler sur ce projet en dehors de nos cours, tout en recherchant des partenaires pour financer la construction de la voiture. Les compétitions de Formula Student se tiennent toutes à l’étranger car nous n’en avons pas en France (on y travaille actuellement).
Face à nous, le niveau est énorme, notamment en Allemagne où les constructeurs sont directement impliqués avec un programme totalement orienté sur la Formula Student et avec plus d’étudiants disponibles ! En France, on espère avoir un soutien identique de nos constructeurs car nous avons besoin qu’ils s’investissent à nos côtés.”
Merci RS !
Article très intéressant.
Vous devriez en écrire plus sur les ingénieurs, dessinateurs, techniciens, mécaniciens, motoristes qui conçoivent, construisent, mettent au point et entretiennent les voitures de course. Des articles sur les différentes écoles de pilotage et filières d’apprentissage seraient aussi les bienvenus.
Merci RS pour ces interviews / reportages tout au long de la saison !
+1 avec NicoSub,
Et même, pourquoi pas rêver d’une série d’articles “en immersion dans une équipe WRC” ?