Camilli : “Jouer la régularité au Mexique”



Le français Eric Camilli revient longuement sur sa prestation au rallye de Suède.

ses performances mais aussi ses difficultés et son envie de rebondir dès la prochaine épreuve au Mexique.

“L’approche de ce rallye était un peu délicate par rapport aux autres épreuves, on ne savait pas vraiment si le rallye allait se faire ou non déjà. Lors des reconnaissances, ce n’était pas évident, car reconnaître sur un terrain entièrement boueux avec des pneus cloutés et ensuite se retrouver le jour du rallye sur des spéciales enneigées, c’est loin d’être idéal. Je m’attendais à ce que le profil de la route évolue énormément du coup.

L’approche en amont n’était pas évidente non plus, j’ai regardé de nombreuses vidéos et il a fallu adapter mon système de notes en fonction des virages rapides qui sont spécifiques à ce rallye.

J’ai du améliorer mon système au niveau des angles pour les courbes rapides. Par exemple, un gauche 5 pour moi c’est un angle qui passe plutôt rapidement, sur un rallye tel que la Sardaigne, la Corse, le Portugal ou même la Grande-Bretagne, il y a en a régulièrement mais ça ne représente peut-être que 10% du parcours. En Suède, c’est plutôt 60% donc il a fallu différencier ce type de virage, avec des courbes plus ou moins ouvertes. On rentre dans ces virages entre 140 et 170 km/h, et on a constamment ce genre de virages, donc il y avait pas mal de travail à ce niveau là.

Lors des reconnaissances, on a pas mal discuté avec Ogier, Tänak et Breen, on se demandait un peu comment on allait pouvoir rouler car on était parfois presque embourbés. On espérait tous de la neige afin d’avoir un rallye qui se déroule dans de bonnes conditions. Comme les médias et les organisateurs, on a pu en discuter ensemble en attendant la neige. Finalement, elle est arrivée dès le premier jour de course.

La première spéciale était à moitié verglacée, c’était un peu étrange, vraiment difficile pour moi de découvrir à la fois, la WRC, les routes rapides, sans mur de neige en plus, les arbres, dans l’ensemble c’était même un petit peu glauque par moment.

Le terrain était déjà dégradé dans la première avec ma position sur la route. Ils ont pris des cordes incroyables, je ne pouvais pas mieux faire pour débuter, même si j’étais derrière certaines WRC-2.

Camilli-3-Suede-2016

C’était vraiment difficile d’aller chercher des freinages, d’envoyer la 6e à longueur de temps, je voyais les arbres défiler, mais en tout cas, j’ai tout de suite senti que je pouvais le faire et que ça allait venir. Dans la deuxième, il y avait quelques murs de neige mais je n’ai pas osé m’appuyer dessus car ils n’étaient pas très importants. On a quand même attaqué davantage, même si nous étions encore un peu derrière Breen dans la deuxième.

Dans la troisième spéciale, on a commencé à trouver un rythme plus intéressant, on n’a pris qu’une seconde au kilomètre, donc c’était encourageant. L’après-midi, on a refait cette spéciale qui me plaisait énormément (ES4/ES7 de Svullrya), on a bien attaqué mais le chrono ne se voit pas car on fait un tête-à-queue dans une épingle où il y avait des morceaux de glace, comme s’il y avait un lac en-dessous. On a tourné sur nous-même et on a perdu plus de vingt secondes, sinon on réalisait le temps d’Ostberg (mon erreur est arrivée au dernier intermédiaire).

On a confirmé cette vitesse dans la spéciale d’après avec un chrono à huit secondes du scratch, donc pour une première, nous étions plus que ravis. Le lendemain matin, on est parti sur le même rythme mais j’ai fait une erreur d’appréciation en reconnaissances.

Le virage était un peu en deux fois et j’ai noté seulement la fin du virage, ce n’est même pas qu’il se refermait, il y avait vraiment un virage à la fin en ciel caché. J’ai entamé mon premier virage qui n’était pas si serré que ça et quand je suis arrivé au ciel, il y avait vraiment l’angle du virage. Je n’ai même pas pensé prendre le virage car pour moi il n’y était pas, il était 20 mètres plus loin.

J’ai pas vu mal d’autos ensuite qui sont sortis larges à cet endroit et Ostberg m’a dit qu’il ne savait pas comment il était resté sur la route. Il n’y avait pas de mur de neige et on a pris une souche d’arbre pour finir en tonneaux.

Le rallye serait à refaire demain, je ne pourrais pas mieux faire pour éviter cette erreur. On ne peut pas se rendre compte de la difficulté de découvrir une telle épreuve sans y avoir mis les pieds. Aujourd’hui, c’est vrai je fais des erreurs, c’est ma deuxième sortie en deux rallyes. J’essaye de ne pas trop lire les critiques des gens car c’est souvent facile de critiquer et comparer aux autres pilotes de championnat du monde qui ont souvent eu la possibilité de découvrir ce rallye avec le n°80 sur les portières.

On traverse une passe difficile mais il ne faut pas oublier que je n’ai même pas fait 40 rallyes dans ma carrière. Découvrir une WRC, la Suède en tant que pilote officiel, ça n’est jamais arrivé pour un pilote français. Après, je fais ce que je peux, je ne suis pas bête, je n’ai pas envie de sortir de la route à chaque rallye. Faire une erreur en Suède, avec des conditions délicates comme cette année sans mur de neige avec mon peu d’expérience en terre scandinave, ce n’est pas insensé. Mon but était bien sûr de finir le rallye, les chronos commençaient à être bons et il faut quand même attaquer un minimum pour apprendre. Je suis conscient que j’ai fait une erreur et maintenant il faut rebondir.

Au niveau des comparaisons, selon moi il est impossible de me comparer à Evans. Il sort de deux années en WRC et une autre en R5. L’expérience est complètement différente entre nous. L’an dernier, je me battais aussi pour la victoire en WRC-2, donc c’est impossible de comparer le niveau des deux catégories de toute façon .

Vu la vitesse à laquelle ça roule en WRC, le climat est complètement différent, l’an passé tout le monde critiquait Neuville pour ses sorties, cela peut vite tourner, donc parfois les comparaisons et les critiques sont difficiles à entendre.

Camilli-2-Suede-2016

En trois ans, je suis arrivé en WRC et sur une quarantaine d’épreuves, je ne suis sorti qu’à 4 ou 5 reprises, mais à chaque fois à des moments où je suis sous le feu des projecteurs comme en Allemagne en Junior. C’est sûr, je suis un peu de nature attaquant, car un jour j’ai envie de devenir très rapide en WRC. Certains pilotes ont une dizaine d’années d’expérience en championnat du monde, même Paddon a roulé de nombreuses saisons avec des Mitsubishi, Subaru ou Skoda avant d’arriver chez Hyundai.

En Suède en plus, il est difficile de savoir quand tu roules doucement ou non. C’est toujours très rapide et comme nous n’avons pas les intermédiaires, il est impossible de savoir si tu es dans un faux rythme. Pour moi vendredi matin, j’étais à 80% en essayant d’être propre, mais après je n’étais pas sur un gros rythme non plus, c’est une erreur de notes dans un virage qui paraissait différent lors des reconnaissances avec la terre. Il faut encore je m’habitue réellement à la vitesse de la voiture. A part ce virage, nous n’avons pas eu de frayeurs du rallye mais c’est comme ça.

Je ne me mets pas plus de pression que ça, on va jouer la régularité sur les deux prochains rallyes cassants. Le Mexique, je pense que c’est le rallye du championnat du monde qui me parle le moins, même en terme d’images, ou quoique ce soit. Ca a l’air vraiment d’être un rallye très sympa avec notamment une très longue spéciale sur de belles routes.

A moi de faire un rallye plus régulier, il faudra terminer, et si on termine dernier des WRC c’est comme ça. En Argentine, ce sera peut-être la même chose et il faudra s’adapter pour trouver un bon compromis sur chaque rallye. C’est vrai qu’avec notre position sur la route, on pourrait espérer des choses, mais avec ma sortie en Suède, mon approche change un peu pour le Mexique et il faudra vraiment être au bout. J’ai toujours le soutien et la détermination de Malcolm en vers moi, mais je n’ai pas envie de jouer avec ça.

Pour la spéciale de 80 kilomètres, niveau physique ça ne devrait pas poser de problèmes, mais il faudra gérer d’autres paramètres comme les freins, les pneus et le moteur avec l’altitude. Si on fait un rallye régulier sans forcément chercher à réaliser des temps, on devrait grappiller des places au général au fil du rallye. Il faudra vraiment être patient cette année.

Pour préparer ce rallye, on roulera une journée en Espagne la semaine prochaine.”




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Araden
Araden
8 années il y a

J’ai une question qui n’est pas vraiment en rapport avec Camilli. Pour 2017, c’est M-Sport qui va s’occuper totalement de la conception de la voiture ou Ford va donner un petit coup de main ?
J’aimerai tellement que Ford s’engage officiellement en WRC à partir de l’année prochaine !

Boris STi
Boris STi
8 années il y a

Tient j’ai une petite question.
Que fait un pilote hors essais et hors course (leur activités par exemple) ?
Cette question