A.Fourmaux : “Je suis encore sur mon nuage”

Cinquième à l’arrivée de cette épreuve inédite du calendrier, le pilote nordiste a su se montrer très régulier, tout en claquant deux chronos magnifiques le samedi alors que la bataille faisait rage devant et à des conditions égales. Au lendemain de cette première admirable, Adrien a pris le temps de nous répondre comme après chaque épreuve du WRC.

Es-tu redescendu de ton nuage ou même de ton paradis comme tu l’as évoqué pendant l’épreuve ?

“En fait, je suis encore sur mon nuage, c’est incroyable, je ne m’attendais pas à ça. J’ai dépassé tous les objectifs que je m’étais fixé au départ. Maintenant, je profite et je me repose. Je prends le temps de voir les messages que j’ai pu recevoir, surtout les personnes qui me sont les plus proches. Je dois encore en appeler certaines, je pense que c’est important de profiter après un tel week-end.”

Tu as globalement signé de nombreux temps dans le top 5, mais tu as particulièrement été performant dans la spéciale de “Mali Lipovec – Grdanjci” avec à chaque fois le 2e temps. Quel était ton secret ?

“C’est parce-que je l’aimais bien ! Elle était très variée avec trois parties distinctes. La première était très rapide avec de petites cordes. Après une épingle, on avait une montée hyper technique, puis on terminait sur une descente où j’avais l’impression de skier, même lors des reconnaissances ! On a bossé plus sur cette spéciale, en regardant davantage nos vidéos de reconnaissances car je savais que je serai vraiment en confiance dans cette spéciale. J’avais en tête de faire un temps dans le top 4/ top 5…c’était finalement un peu mieux que ça !

Après le chrono du premier passage où c’était une super surprise d’avoir fait ce 2e temps, j’avais en tête de bien rouler de nouveau. On a regardé les intermédiaires sur la liaison, on a cru jusqu’au bout au scratch. Evans perd pas mal avec un manque de feeling, Ogier crève et puis finalement Neuville qui nous bat malgré une belle remontée de notre part sur la fin de la spéciale. On avait tout perdu sur les premiers kilomètres.

Dans ce chrono, j’ai bien roulé évidemment mais je n’ai pas surconduit. J’ai roulé en étant hyper appliqué. Dans les endroits où il fallait un peu s’engager, je n’en ai pas fait trop et je me suis appliqué énormément.”

À l’issue de ce chrono, tu avais l’impression d’avoir été bien plus rapide que dans les autres ?

“À l’arrivée de la spéciale, je sentais bien que ça avait roulé, mais vu que je n’ai pas l’habitude de cette voiture, je ne savais pas jusqu’à quel point. Mais je n’aurais clairement pas pensé pouvoir faire un tel temps face aux meilleurs pilotes du monde.”

Avais-tu la possibilité d’être aussi performant dans les spéciales suivantes ?

“Après avoir fait un temps comme ça dans cette spéciale, j’ai préféré capitaliser sur cette performance et ne pas prendre le risque de m’enflammer derrière. Il fallait rester concentré et continuer à rouler libéré en ne forçant pas les choses.”

Qu’as-tu pensé de ce rallye de Croatie en général ?

“C’est le rallye où j’ai pris le plus plaisir dans toute ma carrière. Les spéciales sont magnifiques, il y a vraiment de tout et c’est hyper varié, c’est un rallye très beau. C’était également un plaisir de voir des spectateurs. Honnêtement, en voyant ce monde et en écoutant les photographes me parler de l’ambiance dans les spéciales, tu comprends l’importance des spectateurs sur un rallye. Globalement, l’ambiance était spéciale.”

As-tu changé souvent les réglages de ta Fiesta ?

“Oui, surtout lors de la première journée de course. Nous sommes par exemple partis sur une répartition du couple avant/arrière réglée davantage sur l’arrière et j’avais un comportement typé propulsion donc la voiture survirait. Après ça, nous sommes rapidement passer à du 50/50 sur le différentiel central. On a également changé des choses au niveau de la barre anti-roulis, des clics d’amortisseurs ou encore la garde au sol.

À partir du vendredi soir, la voiture me convenait bien. J’étais accompagné de l’ingénieur habituel de Teemu Suninen et cela s’est super bien passé, on a eu une bonne entente. On a pu bosser ensemble pendant une journée et demie en essais avant l’épreuve. Il m’a fallu une soixantaine de kilomètres pour bien me mettre dans le rythme et être à l’aise dans la voiture. On a aussi fait 120 km sous la pluie, ce qui n’a pas vraiment servi mais heureusement car personne n’aurait voulu rouler sous la pluie sur ces spéciales.”

Comment peux-tu nous décrire cette Fiesta WRC en quelques mots ?

“Bestiale, démente, magique ! La vitesse que ça prend…c’est un truc de dingue. Même le bruit du moteur, pour être honnête, c’est vachement beau ! Même avant de monter dans cette voiture, j’avais été séduit par le moteur. À l’intérieur de la voiture, j’avais mes repères habituels, on sent que nous sommes dans une voiture développée par M-Sport.

J’ai une petite anecdote concernant cette Fiesta. Samedi après-midi à un arrêt de bus, nous sommes assis devant la voiture avec Renaud. Et à ce moment, on se dit quand même que la voiture a beaucoup de gueule, et en plus avec la déco Red Bull. C’est une sacrée bête avec tout cet ensemble aéro !”

Es-tu content de tes choix de pneus ?

“Je suis super content du boulot avec mes ouvreurs. On a toujours été dans le coup même si on a été un poil optimiste pour la toute première spéciale. On a mis 4 durs alors que c’était un peu humide alors ce n’était pas évident pour débuter ! Pour le reste du rallye, nous étions dans le coup. Même en ayant fait le bon choix de pneus, on a essayé des choses, en croisant les pneus sur certaines spéciales par exemple, avec plus ou moins de succès.”

Explique-nous ton erreur du dimanche. As-tu eu peur que ta course s’arrête là ?

“On a justement voulu croiser les pneus pour cette spéciale-là. En chauffant les pneus, je ne voulais pas surchauffer les tendres ni que les durs soient trop froids…Il y a eu un petit retard et cela a compliqué les choses avec de l’attente au départ. Donc au premier gros frein, j’ai glissé et je suis allé dans le talus. C’était aussi un sacré piège cet endroit, et Neuville m’en a parlé en me disant que cela avait été assez chaud pour lui également.

Cet accident m’a amené à deux réflexions. La première, que nous étions désormais sous la pression de Katsuta qui était revenu à 15s alors qu’il était à plus d’une minute avant ça. La deuxième, c’est que dans une situation comme ça, nous avions bien réagi, sans paniquer et en essayant d’analyser calmement la situation. En paniquant, j’aurais pu empirer les choses en essayant de forcer par exemple. Au final, 6 ou 7 spectateurs nous ont aidé pour repartir.”

Est-que tu as eu des remarques de félicitations qui t’ont marqué plus que d’autres ?

“Bien sûr, globalement toutes les personnes qui m’ont permis de vivre de tels instants. Les messages de Richard et Malcolm tout d’abord, mais aussi de Red Bull, d’Eric Candelier, président de Yacco, et la FFSA évidemment. C’est un gros parcours pour atteindre ce niveau, et maintenant, le plus difficile est d’y rester.

J’ai pu échanger avec ma famille également. Il faut savoir qu’après chaque course, nous avons un débriefing qui peut durer jusqu’à 18h. Après ça, je suis vraiment relax, la pression redescend et je commence à subir un peu les événements, même une discussion. Hier soir, c’était un super moment ! Du coup, aujourd’hui, je peux continuer à lire les différents messages que j’ai reçu et appeler mes parents par exemple.”

La prochaine épreuve en WRC c’est quand ? Est-ce que ce résultat va accélérer les choses ?

“J’espère de tout coeur que cela me permettra de faire un peu plus d’épreuves avec la WRC, ça paraît forcément logique quand tu montres de belles choses comme ça. Ce serait une énorme expérience de faire toute une saison, mais il faudrait déjà que M-Sport puisse aligner 3 Fiesta WRC sur chaque épreuve ! Ce que j’aimerais déjà, c’est de voir mes performances sur un rallye terre avec cette voiture. Mais le principal, c’est de rouler.

Ce qui est positif dans cette épreuve, c’est que j’ai appris plein de choses avec plein d’axes de travail pour m’améliorer pour la suite. Je vais juste essayer de faire de mon mieux et d’être le plus performant possible, tout en gardant une bonne gestion de course comme ce week-end.”