Que sont-ils devenus ? #12- Sébastien Chardonnet



Avec une saison actuelle à l’arrêt, le moment est idéal pour s’intéresser à ceux qui vous ont émerveillé dans les années 2000, avec de jeunes pilotes aux dents longues mais aussi des pilotes aguerris, prêts à se dépouiller sur les routes des championnats de France asphalte et terre.

Encore plus qu’aujourd’hui, les formules de promotion étaient d’une densité folle avec des plateaux dépassant parfois la trentaine de concurrents au départ, tous prêts à se battre pour le moindre dixième. Parmi eux, certains ont atteint la gloire, avant de disparaître peu à peu des radars des rallyes et du public.

Ancien pilote officiel Citroën en 2014 et champion du monde WRC-3 en 2013 , Sébastien Chardonnet est le douzième pilote à répondre à notre invitation pour cette rubrique : “Que sont-ils devenus” ? 

Faits marquants en carrière

2014Saison en WRC-2 (Citroën DS3 R5)
2013Champion WRC-3 et Citroën Top Driver (Citroën DS3 R3T)
2012Rallye de France Alsace avec une Citroën DS3 WRC
2011Vice-champion de France Junior (Renault Twingo R1)
2009Début en rallye

Quelle est ton activité aujourd’hui ?

“Elle est multiple ! Pendant mes premières années en rallye, j’ai monté la société Chardonnet Compétition, structure qui me permettait alors de développer ma carrière.

En 2013, on avait une petite activité de préparation avec des Autobianchi A112. L’année suivante, on a eu le plaisir de faire rouler deux Autobianchi pour Daniel Elena et Pierre Casiraghi au Monte-Carlo Historique.

En 2014, j’ai ralenti largement mes activités avec mon programme officiel chez Citroën. Début 2015, je voulais me concentrer sur ma carrière mais à partir d’avril, et alors que n’avais pas le budget pour rouler en championnat du monde, j’ai relancé l’activité des voitures historiques.

Après la fin de mon programme en Italie, je me suis concentré essentiellement sur Chardonnet Compétition avec la préparation, la restauration et la vente de voitures de compétition historiques comme une Lancia Beta groupe 4, les Abarth A112 groupe 2 ou encore une Lancia Delta groupe A. L’atelier est devenu trop petit et il a fallu déménager du côté des Cévennes dans les ateliers du team de Bruno Abric (AB Sport Auto), qui avait de la place à nous proposer.

L’entreprise a bougé mais moi je suis resté en Italie, à 4h30 de l’atelier finalement. Pendant un temps, j’ai fait pas mal d’allers-retours évidemment.

Je veux rester sur un sytème léger pour l’entreprise avec seulement des personnes indépendantes. Au final, j’ai un réseau de 10 à 15 collaborateurs.

En pilote, je m’éclate dans le championnat Ultimate Cup Series au volant d’une Renault RS 01, en étant en plus rémunéré. Je suis dans un autre mode que dans ma carrière en rallye ou avant dans mes débuts sur circuit, mais c’est très sympa aussi. J’ai hâte que la saison démarre avec le team. 

En 2020, j’ai la possibilité de faire du coaching en circuit et en rallye. Je voulais aussi m’orienter vers l’organisation d’événements comme des séminaires mais le COVID a changé mes plans. Cette période me permet au moins de me concentrer sur le Winter Classic Rally, épreuve dont je suis le co-fondateur. C’est un gros projet avec un rallye VHC/VHRS à disputer en janvier prochain. En parallèle, il y aura une compétition eSport également grâce à un partenariat avec Big Ben, éditeur du jeu officiel du WRC.

Et je n’oublie évidemment pas mon fils de 4 ans qui m’occupe également beaucoup.”

A partir de quel moment tu as compris que ce serait impossible d’accéder à un contrat pro en WRC ?

“C’est l’objectif de chaque pilote mais très peu de pilotes sont réellement professionnels, c’est à dire sont rémunérés.

Sur la période 2013-2015, seul Kris Meeke était réellement payé chez Citroën, grâce à des participations financées par Total et Abu Dhabi, qui portaient à bout de bras l’équipe. Avec le programme WTCC en parallèle, ce n’était pas facile.

Je n’ai jamais eu de contacts avec M-Sport et j’ai toujours eu envie de rouler avec Citroën. En étant parrainé par Daniel Elena et avoir toujours roulé avec eux, c’était assez logique. En 2015, j’aurais bien pu contacter M-Sport pour le Monte-Carlo mais j’ai préféré rouler avec la DS3 WRC, même avec des spécifications de 2012.

Je savais très bien que mes chances de grimper chez Citroën étaient très minces. 

En 2015 et après une saison super compliquée avec la Citroën DS3 R5, j’avais seulement deux options.

La première était de repartir sur une saison en WRC-2, mais c’était financièrement impossible. La deuxième était de tout faire pour rouler avec une WRC en fédérant autour de ce projet (un programme comme Loubet aujourd’hui par exemple). Si j’arrivais à un résultat prometteur, cela allait peut-être séduire des partenaires.

On a organisé une journée partenaires avec un plan de financement suite à un devis proposé par PH Sport. On avait 30% du budget pour faire 8 rallyes à un bon prix. C’était impossible de faire mieux, et des partenaires voulaient seulement s’engager si le programme était complet.

J’ai pu rouler en Italie ensuite avec Ford,  sans avoir à financer le programme. Malheureusement, la saison s’est arrêtée car il n’y avait plus de chances de gagner le championnat, et en plus, le budget était trop juste.”

As-tu eu des opportunités ensuite ?

“Je n’ai jamais cherché à revenir ensuite. Ce n’était pas facile de commenter les live sur l’Equipe 21 et de voir ses anciens adversaires rouler. Cela m’a pris 6 mois pour un faire le deuil de cet arrêt de carrière finalement.

J’ai eu un coup de téléphone sympa de l’attachée de presse de Citroën il y a quelques années. On avait la possibilité de faire un reportage avec l’Equipe 21 et la Citroën C3 R5. Le but était de participer en ouvreur au Tour de Corse avec un rôle aussi de reporter en quelque sorte. C’était à deux doigts de se faire mais je n’ai jamais pas vraiment compris les raisons de cet échec. C’est finalement Alexandre Bengué qui a eu le volant.

Maintenant, j’ai pris du recul par rapport à tout ça, j’ai quand même roulé dans des superbes autos et dans toute la planète comme en Nouvelle-Zélande ou en Argentine.

Au cours des dernières années, j’ai fait le dévérminage de la R4 de chez Oreca, et cette voiture m’a bien plu. Je me verrais bien faire un rallye terre avec.”

Quel a été le meilleur moment de ta carrière ?

“L’Allemagne 2013 où l’on gagne le Citroën Top Driver avec la DS3 R3. Nous étions en tête du championnat mais n’avions pas encore gagné. J’avais une carence sur terre et j’attendais cette première sur asphalte avec l’objectif net de gagner. On a été en tête pendant tout le long de la course malgré plusieurs problèmes mécaniques. Cette saison a été top tout au long de l’année.

Le Monte-Carlo 2014 a été top également avec le premier rallye de la DS3 R3 Max et un gros résultat pour Citroën. L’Alsace 2012 en DS3 WRC est forcément aussi spécial.”

Quelle a été la voiture préférée dans ta carrière ?

“La Citroën DS3 WRC sans hésiter. Elle a une facilité d’accès incroyable. En étant au moins à 90% de ses capacités, elle va très bien avec une direction précise. Tu peux la placer comme tu veux en jouant avec le frein à main. Tout est parfaitement abouti.

J’ai pu retrouver des sensations de monoplace et de circuit, comme avec la RS01 par exemple.”

Quel copilote t’as le plus apporté ? 

“Thibault de la Haye bien évidemment, j’ai toujours roulé ave lui sauf le Sanremo avec Maxime Vilmot qui est un pote et avec qui j’avais prévu de rouler un jour. On a toujours travaillé en équipe et ensemble. Nous nous sommes formés mutuellement en rallye. Nous étions meilleurs amis avant de démarrer en rallye, et ça n’a pas changé. C’est un peu comme une relation de couple.”

Si tu devais refaire un rallye aujourd’hui ? Ce serait lequel et avec quelle voiture ? (Budget illimité)

“La Yaris WRC en Finlande. J’ai vraiment envie de voir cette génération de voitures. Vu ce que j’ai ressenti avec la DS3 WRC, cela doit vraiment être quelque chose d’incroyable. 

Et la Finlande, car c’est le rallye que je craignais le plus mais en fait celui où j’ai pris le plus de plaisir.”

Que penses-tu globalement du rallye français aujourd’hui, du championnat asphalte avec les R5 mais aussi des formules de promotion ?

“Pour tout avouer, je ne suis pas vraiment le championnat de France, hormis quelques pilotes sur Instagram comme Quentin Gilbert. J’ai été ouvreur d’Anthony Puppo, donc j’ai pu être sur quelques manches quand même.

Je continue de penser que Rallye Jeunes est une bonne passerelle avec l’espoir de sortir 1 ou 2 bons pilotes chaque année. Fourmaux peut aller vite mais il doit gagner en régularité pour espérer gagner un championnat.

La fédération française n’a pas les moyens d’aider autant que la Finlande avec ses pilotes. Là-bas, les pilotes finlandais professionnels redonnent une partie de leurs gains à la fédération. Si des pilotes comme Loeb/Ogier avaient donné une partie de leurs revenus pour financer un programme de jeunes en rallye, cela aurait pu changer des choses.

Pour les formules de promotion, il semble de plus en plus compliqué de rouler. J’ai débuté en Twingo R1, et c’était assez rock ‘n’roll quand même ! Je n’avais pas le budget pour la DS3 R3 donc cela m’a bien dépanné quand même.

Je verrais bien une sorte d’académie française en rallye avec une sélection beaucoup plus large d’une quinzaine de pilotes. Cette sélection participerait à des formations aux médias et des cours de pilotage. A la fin, 4-5 pilotes sortent du lot et on essaye de voir financièrement ce qu’il est possible de faire avec eux. C’est quand même dommage de ne pas avoir bénéficié des 15 dernières années pour préparer l’avenir.

De mon côté, je me suis dit que je ne m’étais jamais battu à armes égales face à des gars comme Mikkelsen et Lappi. Les Solberg et Rovanperä confirment cette tendance.”

As-tu des conseils à donner à un petit jeune qui débute en rallye ?

“Il faut être super déterminé et ne rien lâcher. Il faut se supérieur et toujours plus que ce qu’on croit capable de faire.

Il faut vraiment être un excellent commercial, et c’est bien plus compliqué de se vendre soi-même, que tout autre chose, et je l’ai bien vu avec mon entreprise.”




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jmb17
jmb17
3 années il y a

J’ai déjà le prénom qui va bien. Manque plus qu’les sous.
Recherche sponsors désespérément.
=> SVP, pour mon char, donnez !

Tonio
Tonio
3 années il y a

Mouais contrairement à beaucoup d’autres portraits, je pense qu’il était déjà surcoté et qu’il a eu beaucoup de chance d’avoir ce parcours…. au suivant