Interview Loeb sur son avenir



Source Libestrasbourg Depuis le début du millénaire, l’Alsacien Sébastien Loeb (34 ans) domine le championnat du monde des rallyes avec un record de 47 victoires....

en Loeb (34 ans) domine le championnat du monde des rallyes avec un record de 47 victoires. Sacré pour la cinquième fois de suite au Japon il y a un mois, Loeb et son fidèle copilote Daniel Elena ont terminé le boulot dimanche au Pays de Galles en permettant à Citroën d’ajouter un titre de champion du monde des constructeurs. Il repartira sur les rallyes en 2009. En attendant, qui sait, qu’une écurie de F1 ait le cran de lui proposer un volant. Interview.

Cinq titres : record battu. Ça prend sens pour vous ?

Bien sûr. Ce n’est jamais un titre de plus. C’est un soulagement, déjà, et une récompense. En 2008, on gagne plusieurs rallyes, énormément de spéciales. La voiture est parfaite, mais il faut toujours aller chercher un résultat. Parfois, on fait la différence pour une seconde sur 20 km. Mikko Hirvonen [sur Ford Focus, son principal adversaire, ndlr] a toujours roulé très fort. Au bout du compte, je préfère quand c’est comme ça : la bagarre. La vraie.

Comment votre pilotage a-t-il évolué depuis vos débuts en WRC ?

De manière très, très progressive. J’ai pris de l’assurance. Par rapport aux terrains proposés, aux réactions de la voiture. Quand tu débutes en WRC, tu te demandes toujours si tu ne glisses pas trop. En fait, il y a des terrains où il faut glisser et d’autres non : c’est l’expérience qui fait le tri. Avec le temps, tu réduis les risques que tu prends quand tu vas vite. Ou plutôt : tu les prends quand il faut vraiment rester devant.

Prendre des risques, ça signifie quoi à votre niveau ?

Reculer le moment où l’on freine.
C’est un plaisir ?
Ça dépend. Du terrain et des circonstances. Sur des cailloux ou des terrains mauvais et peu roulants, ce n’est pas drôle. Mais sur des rallyes rapides comme celui de Finlande [anciennement rallye des Mille Lacs, ndlr], par exemple, oui, il y a du plaisir, même si je garde à l’esprit que je ne suis pas venu pour rigoler.

Pouvez-vous nous en dire plus sur cette sensation de plaisir ?

C’est… compliqué. On est tellement concentré sur ses propres gestes, sur la voix du copilote qui lit les notes… C’est difficile d’apprécier sur le moment. Pourtant, plus tu attaques, plus tu exploites au maximum la voiture et le terrain, et plus tu prends de plaisir. Le plaisir va avec l’implication. Faire un bon temps est la récompense de cette implication : le vrai plaisir est toujours là.

Est-ce que les bonnes sensations sont toujours confirmées par le chrono ?

Disons que quand un chrono n’est pas bon, les suivants ne le seront pas non plus. Ça veut dire qu’il y a un problème : sur la voiture ou dans la tête du pilote.

Vos adversaires vous reconnaissent une nette supériorité sur l’asphalte, où ils apparaissent résignés. Ça vous flatte ?
Je suis à l’aise sur l’asphalte, oui. Peut être que, pour moi, c’est plus facile d’aller chercher la limite lorsque il y a beaucoup d’adhérence, ce qui n’est pas garanti quand tu roules sur terre. Et je constate que la plupart des pilotes ont un ressenti qui est le contraire du mien.

Ne seriez-vous pas un pilote de circuit contrarié, finalement ?

(Rire.) Etant cinq fois champion du monde, je peux difficilement me dire que j’étais plutôt fait pour courir en circuit.

Votre motivation ?

Le rallye est ma passion et mon métier. Bon, la motivation est parfois entamée quand je pars deux ou trois semaines. Disons que le rallye me saoule du lundi au jeudi soir : les reconnaissances, les avions, les sollicitations, tout ça… Mais, une fois dans la voiture, ça me plait. Alors : un travail jusqu’au jeudi, une passion ensuite.

La rivalité entre les pilotes de rallyes semble moins exacerbée qu’en F1.
J’ai le même sentiment. Pas de coups bas en rallye, pas de contacts directs entre les pilotes non plus : on ne peut pas mettre l’adversaire dans le fossé vu que l’on part en décalé (sourire).

Après une Red Bull de F1 et un prototype d’endurance Peugeot 908, n’est-ce pas un peu fade de se retrouver au volant d’une Citroën C4 ?

J’ai vécu deux expériences extraordinaires, mais bon : à 300 km/h dans la ligne droite sur le circuit Paul-Ricard, il y a moins de sensations qu’à 150 à l’heure sur un chemin en terre. J’ai beaucoup à apprendre en pilotant sur circuit. Mais le rallye est plus varié. La voiture saute, glisse, bouge. Le terrain change sans arrêt. Il faut bien reconnaître que, sur circuit, c’est répétitif. Pour l’heure, le pur plaisir se trouve au volant de ma Citroën C4.

Le calendrier et les règlements des rallyes évoluent. Ça pourrait vous pousser à aller vers autre chose ?

Courir moins, ça m’arrange. Et le calendrier 2009 est nul [avec notamment l’absence des rallyes de Monte-Carlo, de Corse et d’Allemagne, trois courses fétiches pour Loeb, ndlr]. Plusieurs choses peuvent m’inciter à continuer ou arrêter : la réglementation, l’évolution des voitures, le calendrier… Un exemple : courir avec des pneus uniques, c’est pas marrant. Et parfois dangereux, comme lors de ce rallye de Grande-Bretagne, où nous nous sommes lancés dans les spéciales avec des pneus terre alors qu’il y avait de la glace. Ce genre de truc ne m’amuse pas trop.

Revenons à la F1. Vos test avec Red Bull ont impressionné. Si le Père Noël vous offre un volant, pourriez-vous remettre en cause vos contrats pour courir en F1 ?

Aujourd’hui non. J’ai un contrat pour courir en rallye avec Citroën en 2009. Mais avoir un programme d’essais en 2009 et courir en 2010, oui, je prends.

Vous disiez être trop âgé pour la F1.

Ce sont les patrons d’équipe en F1 qui pensent que je suis trop âgé. Dans ma tête, je ne le suis pas. Ce n’est pas un obstacle pour moi. Si j’ai l’opportunité de prouver que je peux aller vite en ayant un véritable programme d’essais, pourquoi pas ? Je serai loin de repousser une offre, c’est sûr.

Vous pensez piloter jusqu’à quel âge ?

Je ne sais pas. Je me vois arrêter le rallye pour aller vers quelque chose de différent, de nouveau. J’ai besoin de piloter, mais je dois trouver quelque chose qui m’amuse, sans prendre trop de risques. Je ne vais pas piloter entre les arbres toute ma vie.

Avez-vous songé à votre après-carrière de pilote ?

Je ne me vois pas rien faire. Pourquoi pas tenir un petit restaurant dans le Sud ? Il faut faire quelque chose, on ne peut pas être en vacances tous les jours.

Recueilli par Lionel Froissart




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