Les étoiles de Monté Carlo : Sébastien Loeb, les 7 succès capitaux



Après un premier récit sur Walter Rörhl, l’un des rois du Monte-Carlo, un autre grand nom de l’épreuve monégasque est au menu de cette rubrique : Sébastien Loeb.

Toujours en activité malgré ses 45 ans, l’infatigable pilote alsacien est le co-recordman de victoires sur cette épreuve avec Sébastien Ogier.

Tout comme pour Walter Rörhl, Jeff retrace les exploits du nonuple champion du monde de 2001, date de sa première participation, à 2019.


Quel est le meilleur rallyman de tous les temps ? Eternelle question qui n’a pas grand sens car de toute façon, nul ne connaîtra jamais l’ultime vérité…

Le 6 avril 1997, quand Sébastien Loeb débarque au rallye du Florival, il a déjà 23 ans et aucune expérience sur 4 roues. Comme Röhrl 30 ans en arrière, il n’a pas d’argent mais une bonne étoile.

Au volant d’une 106 Rallye prêtée par son mécène et copilote d’un jour Dominique Heintz, Sébastien se loupe au départ de la première spéciale de sa vie mais fait une vertigineuse descente du Col de Firstplan pour signer le 2ème temps sur 18 N1 à… 1sec du chrono de référence. C’est ça le talent ! Quatre spéciales et autant de scratchs plus loin, il remporte sa première victoire. Comme Marecek 3 décennies plus tôt, Heintz a compris…

Monté Carlo 2001. Chez Citroën, on a une idée derrière la tête et on missionne Bugalski, Puras et Loeb pour piloter les trois Saxo Kit Car. L’alsacien écope d’une pénalité avant le départ et connait des soucis de frein. Sébastien et son copilote Monégasque Daniel Elena reprennent 2min34 à p’tit Bug (!) mais échouent à la seconde place en 2 RM. Face à un pilote aussi rapide et expérimenté que Philippe, le natif de Haguenau confirme un potentiel hors-norme en découvrant l’épreuve. Et la voiture n’a pas une égratignure !

18 Jan 2002: Sebastien Loeb of France driving a Citroen Xsara during the Monte Carlo Rally, the first stage of the World Rally Championship. DIGITAL IMAGE Mandatory Credit: Grazia Neri/ALLSPORT

Monté Carlo 2002. De retour à Monaco avec d’autres ambitions et trois Xsara WRC, la marque aux chevrons entame pourtant bien mal le rallye avec les abandons précoces de Bugalski et Rådström. Mäkinen, McRae et Sainz se disputent le trône tandis que la Citroën rescapée de Loeb est 4ème. Ce dernier attend Sisteron – Thoard et son col de Fontbelle pour faire la différence. Nous sommes postés près de l’arrivée dans une partie rapide très bosselée. Au Monté Carlo, quand il y a une portion propre où la grosse attaque est permise, il faut surtout penser au piège qui va suivre…Là, Loeb excelle. Il possède un sens inné de l’équilibre et assimile les informations très rapidement. Il sait lire la route, anticipe les changements de rythmes et l’évolution du terrain.

Sisteron donc. Avec nos amis Belges, les paris sont ouverts. Eux viennent voir Bruno Thiry et leur nouvelle pépite, François Duval. L’ambiance est bonne et je mise sur un scratch de Sébastien… qui nous fait un passage chirurgical. On croit d’abord à une erreur, Colin McRae qui jette furieusement sa Ford dans toutes les cordes encaisserait 20sec par le français… Le triple vainqueur Tommi Mäkinen également…Sur les antennes de RMC, l’exploit est confirmé, l’Alsacien prend les commandes devant la Subaru du tenant du titre. A Puget, Sébastien se fait la belle et leste le pilote de Puuppola de 31sec en 26km ! Premier Monté Carlo au volant d’une WRC et première victoire…croit-on. Pour Subaru, ce crime de lèse-majesté est tellement odieux que la Xsara N°21 se voit sanctionnée d’une étonnante pénalité de 2min… Pour le Finlandais, ce sera le crépuscule d’une immense carrière. Pour nous, c’est la promesse de l’aube.

2003. Quelques années plus tôt, McRae et Sainz avaient déjà fait connaissance avec Plan de Vitrolles – Faye. En 2003, les deux champions du monde se retrouvent chez Citroën aux côtés de Sébastien Loeb. Le jeune Français lui, découvre ce morceau de bravoure de près de 50km et, dès le premier passage… atomise ses équipiers ! El Matador encaisse 17sec, l’Ecossais 43! De retour dans ce juge de paix à la lueur des phares, le gel plâtre insidieusement le goudron. Colin, qui accuse 56sec de retard sur Sébastien décide de tout tenter. Les spectateurs sont ankylosés par le froid mais en phénix du Macadam, McRae les récompense d’une attaque invraisemblable. Un brusque réchauffement climatique. Braveheart franchit la ligne d’arrivée en transe et en 30’04’’07…malgré un tête-à-queue ! Sainz perd 16sec4, le leader Grönholm 16sec7, Burns 35sec4… Loeb arrive à son tour, il est étonnamment calme et réalise 30’04’’07… malgré un tête-à-queue ! Marcus finit par craquer, laissant Carlos et Colin compléter un podium final tout en rouge. Sébastien est intouchable, il décroche sa 1ère victoire à Monaco. Le début d’un règne.

En 2004, Loeb surclasse les Ford de Märtin et Duval. Dans le Col de Bleine, le pilote Citroën terrasse Markko et François qui n’en reviennent pas… et ne reviendront jamais.

Edition 2005. Le tout frais champion du monde tricolore a un nouvel équipier chez Citroën, François Duval. Le Belge n’a qu’un objectif : battre Loeb ! Dès le premier chrono d’Ilonse – Pierlas dans la féerique vallée de la Tinée, Sébastien foudroie la course et « dudu ». François sort dans l’ES6, Sébastien remporte l’épreuve avec 3 min d’avance sur Toni Gardemeister. Alexandre Bengué réussi 2 extraordinaires scratchs au volant d’une Skoda Fabia!

2006 : Échec au roi ! Après 5 chronos au volant de la Xsara Kronos, Loeb possède 1min16 d’avance sur Grönholm ! Ensuite, sous le grandiose promontoire de Pierlas, Sébastien commet une erreur et laisse Marcus imposer sa Ford. L’alsacien finit second.

2007, c’est le retour de l’Ardèche et de la tarte aux myrtilles mais ça ne change rien. La C4 WRC remplace la Xsara mais ça ne change rien. Dani Sordo est le nouveau sociétaire chez les rouges… mais ça ne change rien ! 4ème victoire.

Monté Carlo 2008. Pour la 7ème fois consécutive, Loeb est inaccessible. Dés la seconde spéciale, de nuit, il est aussi rapide qu’une machine à sous et pose 1 sec au kil à « Dani le rouge ». Les autres sont déjà trop loin… Et de 5 ! Si à Monaco gagner aux jeux est synonyme de chance, gagner sur les routes du Monté Carlo n’est pas un jeu de hasard.

2012, après l’intermède IRC, le Monté Carlo accueille à nouveau l’élite. Sébastien Ogier est le héros du rallye. Il vise le podium au volant d’une Fabia S2000 et réussi un hallucinant 3ème temps dans Burzet – St Martial ! Il se retrouve 4ème … avant de fauter. Si Loeb décroche un 6ème sacre, il sait désormais d’où va venir le danger ! Des performances qui occultent un peu celles d’Andersson qui, à défaut d’avoir trouvé une monture (une Proton S2000) à hauteur de son talent évolue ici sur un terrain à sa mesure. Dans Burzet, Per Gunnar est à seulement 7sec8 de la Fiesta WRC de Tänak en 30km et même 11sec devant la DS3 WRC d’Hirvonen ! Souvenir d’un passage après Lachamp -Raphael : inouï !

Cuvée 2013. La menace Ogier se précise. Le pilote de Gap et la VW Polo célèbrent leur mariage par un scratch dès l’ES1. Loeb reprend la main puis, en fin d’après midi, dans le second passage des 30km de Burzet – Saint Martial, l’Alsacien jette un froid. Dès le départ, Sébastien s’aperçoit qu’il ne reçoit aucun « split » et décide alors d’attaquer au maximum. Dans le cadre théâtral de montagnes, de vallées et de hauts plateaux Ardéchois, le décor est un personnage de la course. La légende aussi. Tandis que le gel fige le paysage et la route, « l’abominable Loeb des neiges » plante ses griffes dans la glace. Hirvonen accuse 34sec, Ostberg 50, Ogier 53, Sordo 1minO6… Une véritable dégelée !

Après 4 chronos seulement, Loeb devance Ogier de 1min20. C’est déjà fini. 7ème succès !
Reste en mémoire ce furtif et hallucinant passage au dessus de Saint – Andéol – de – Fourchades où « le monstre » surgit d’un coup et avale ce long gauche étroit et bosselé, pleine charge, en descente en six et en glisse, puis bondit sur le droite et le maitrise d’un prodigieux coup de volant… avant de disparaitre. Que dire de plus ? Que Loeb et le Monté Carlo ne reviendront plus en Ardèche, que 2013 devait être la der’ pour Séb et Daniel mais qu’ils ne résistèrent pas à la tentation de venir défier Ogier en 2015. Le pilote Citroën relègue alors d’emblée son second Tänak à 22sec en 21km à Entrevaux puis, sur les terres du loup du Valgaudemar, il fait une erreur et finit 8ème. Mais la dynastie des Sébastien continue, le plus jeune s’érige en « mâle alpha ». L’histoire bégaie.

2019. A 44 ans, Sébastien Loeb découvre la Hyundai I20 WRC et échoue de 13 sec pour le podium face à Ott Tänak. Sébastien Ogier réalise l’exploit de s’imposer au volant de la C3 WRC qu’il pilote pour la première fois. Avec 6 victoires consécutives, performance inégalée, et trois victoires avec trois marques différentes en WRC, le pilote de Gap marche sur les traces des géants.

11 participations au volant d’une WRC, 11 fois à l’arrivée et 7 victoires, Sébastien Loeb a écrit une des plus belles épopées de l’histoire du Monté Carlo. Le destin d’un homme et d’une épreuve qui resteront à tout jamais gravé dans le même marbre. En 2020, gageons que le météorite qui survolait le Col du Firstplan il y a 23 ans ne sera pas encore tout à fait au crépuscule de sa trajectoire.

Pour moi, de Thérier à Ogier, en passant par Röhrl, Toivonen, Auriol et Loeb, il semble évident que ces comètes du Monté Carlo sont les plus brillantes de la planète rallye. Dans l’univers de Sébastien Loeb, malgré 9 titres de champion du monde et 79 victoires, il y a probablement 7 étoiles qui scintillent un peu plus que les autres…




S’abonner
Notification pour
guest
67 Commentaires
Le plus récent
Le plus ancien Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Spectator
Spectator
4 années il y a

Pour finir une interview de Vettel dans Auto Hebdo où il parle de Loeb:
” ce gars est unique, son talent est quelque chose d’exceptionnel, mais il n’y a pas que cela. Il y a cette intelligence… cest impressionnant et ça inspire le respect. Mais ce qui est plus important c’est que c’est un gars normal et très sympa!”

Spectator
Spectator
4 années il y a

D’accord avec JMB17.Lu dans un autre mag’ il y a quelques années dans une interview de Sébastien Ogier : ” Je me suis inspiré de Loeb et le but était d’essayer de se rapprocher de lui car il est la référence absolue…J’ai un grand respect et une grande admiration pour lui… Si je veux être champion du monde il faudra le battre lui car il est le plus grand…” Loeb et Ogier se respectent. Loeb et Ogier sont deux IMMENSES champions mais leurs talents à quand même des limites… contrairement à la mauvaise foi, à la méconnaissance du rallye et… Lire la suite »