I.Galmiche : “C’était le rêve de ma vie”



Auteure d’un authentique exploit en remportant le rallye Monte-Carlo avec Sébastien Loeb fin janvier, Isabelle Galmiche a réussi un coup de maître en s’imposant dès sa première participation à une manche WRC dans une voiture officielle.

Une dizaine de jours après avoir triomphé sur les spéciales les plus célèbres du rallye mondial, la copilote du Doubs a maintenant repris le cours de sa vie, comme si de rien n’était, loin de la tension extrême de son week-end magique vécu dans la Puma Rally1 n°19.

Cette semaine, Isabelle nous a accordé quelques instants pour revenir sur ce moment qui restera marqué à jamais dans sa mémoire. 

Quand Sébastien t’as proposé de rouler avec lui au Monte-Carlo, as-tu hésité ?

“Non pas du tout. J’avais zéro doute sur cette participation. Je le répète depuis l’arrivée, mais c’était le rêve de ma vie, et je ne pouvais pas louper cette occasion. Depuis longtemps, je disais à Seb, qu’est-ce que j’aimerais faire un rallye avec toi. 

Sur le fond, ce n’était pas illogique qu’il me demande. J’étais super content qu’il le fasse, mais j’aurais compris qu’il choisisse quelqu’un d’autre aussi.

Je suis une vraie passionnée et ma vie tourne autour du rallye, c’était impossible de passer à côté de cette chance.”

Et par rapport à ton métier de professeure de mathématiques, est-ce que cela a été compliqué au niveau de ton agenda ?

“Mon boulot m’a libéré….mais je crois que si cela n’avait pas été le cas, j’aurais pris un congé sabbatique ! Ils étaient tous très contents pour moi et j’ai pu très bien me préparer pour le rallye.”

Comment s’est passé cette préparation justement ?

“Cela a représenté beaucoup de boulot, j’étais plus préparée qu’en temps normal avec beaucoup de choses nouvelles pour moi. J’ai vraiment voulu être carrée, et de toute façon, si je ne fais pas les choses à 200%, je préfère ne pas le faire.

Il a fallu apprendre la réglementation caractéristique du WRC, comme tout bêtement, l’interdiction de prendre un truc donné par quelqu’un sur le bord de la route. Avec l’hybride, j’avais également des choses à découvrir autour de la sécurité et beaucoup de choses à penser en cas de sortie.

Je savais que j’aurais beaucoup de pression pendant le rallye, et tout ce que je pouvais faire avant lors de la préparation, pouvait m’aider à la diminuer. J’ai notamment beaucoup travaillé pendant mes congés de fin d’année.”

Est-ce qu’à un moment, tu as pensé ne pas être à la hauteur ?

“J’ai toujours peur de faire une connerie, je n’ai pas honte de le dire. Avec les enjeux d’un tel rallye avec Seb, je n’avais vraiment pas envie de le décevoir. J’étais surtout stressé le jeudi soir pour le départ du rallye, et en plus de nuit, c’était encore moins évidant.

La veille, j’avais fait tout le routier dans Monaco avec Yoann Bonato pour tout contrôler et ainsi pouvoir être sûre de moi les jours d’après sur les parcours de liaison.

Après, on a toujours la crainte de pointer en retard, ça aurait été dramatique sur ce rallye, encore plus qu’un autre ! Me tromper dans un calcul, ce serait un comble par rapport à mon boulot. En 229 rallyes, cela ne m’est jamais arrivé (hors problèmes mécaniques/routiers), mais personne n’est à l’abri de faire une erreur.”

Qu’est-ce qui a été le plus surprenant ?

“J’ai été vraiment surpris de la vitesse, ça va vraiment vite. En essais, c’était déjà très sympa, mais en spéciale, c’est encore différent. Parfois, je me suis dit que c’était vraiment impossible ce que je vivais. C’était vraiment super.

J’ai des souvenirs plein la tête avec des passages de folie. Toutes ces images qui me reviennent à l’arrivée. Après ça, j’ai eu un peu de mal à redescendre.”

Avec la pression et tout le stress autour du Monte-Carlo, as-tu réussi à te reposer “normalement” ?

“Dès le dimanche soir avant le rallye, j’ai eu beaucoup de mal à dormir. Sur le reste du rallye, ce n’était pas beaucoup mieux. J’étais toujours en train de mouliner dans ma tête en pensant à la journée du lendemain. Quand on voit ma tête à l’arrivée, ça se voit que je n’avais pas dormi ! On me l’a dit d’ailleurs ! Le dimanche soir de la course, je n’ai pas vraiment dormi non plus, et pareil le lundi. Maintenant, je commence à retrouver mon rythme.”

On a pu voir que ton retour à la “vie normale” a été particulier pour toi.

“Jusque là, j’ai toujours souhaité séparer le plus possible, le rallye et mon travail. Mais après le Monter-Carlo, c’était impossible. Je suis du genre effacée et ça m’a fait bizarre de voir cette attention autour de moi. L’accueil à mon école m’a quand même fait plaisir, j’ai eu des applaudissements, c’était sympa. 

Pendant le rallye, c’était difficile avec les médias, surtout en anglais, car je ne suis pas habituée. Après le rallye, c’était sympa de voir que Canal+ venir me voir, je trouvais ça incroyable, mais je n’étais pas à l’aise avec tout ça.”

Est-ce que tu as pris le temps de regarder des embarquées ?

“Oui j’ai un peu regardé, j’aime bien, même si j’ai l’impression de ne pas reconnaître ma voix. J’entends parfois mon accent et ça m’étonne ! Je le rappelle, c’était une fabuleuse expérience et je m’en rappellerai vraiment toute ma vie.”

Est-ce que tu as des axes de progression pour la prochaine fois (si cela se présente) ?

“L’anglais ! Même si je ne suis pas une bille, je manque encore un peu de vocabulaire, notamment technique. J’ai appris beaucoup pendant le rallye, mais je dois travailler là-dessus. Les gars de M-Sport ont été très cools et quand je ne comprenais pas quelque chose, ils arrivaient toujours à le redire d’une autre manière pour que je comprenne. 

Sinon, il faudrait peut-être que je me muscle les bras. Viser et tenir la roue à bout de bras en même temps, ce n’était pas forcément facile pour moi, donc je devais demander de l’aide à Seb.

Quelle est la suite de ton programme ?

“Je vais encore rouler avec Laurent Viana cette année. On va démarrer au rallye des Vins de Champagne mais le programme n’est pas encore défini. Mon but sera toujours de prendre du plaisir, et c’est possible dans toutes les voitures ! Après avec Seb, je n’ai pour l’instant aucune idée, on verra bien.”

Si tu devais refaire un WRC cette année, où aimerais-tu aller ?

“Chaque rallye WRC me plairait, ce serait fantastique de rouler encore avec Seb. Mais autant viser des pays où je n’aurais pas l’occasion d’aller probablement une autre fois dans ma vie, comme la Nouvelle-Zélande ! Pour la surface, j’aime bien les deux. La terre, ça va moins vite, mais la glisse est sympa, j’aime tout de toute façon.”

Est-ce qu’à un moment, tu aurais souhaité être copilote professionnelle ?

“Oui j’aurais bien voulu, mais ça n’a jamais vraiment été réalisable. Si Daniel (Elena) avait arrêté quelques années avant, cela aurait peut-être changé (rires). Mais sinon, je pense que je n’avais pas le bon âge au bon moment, et je pense que c’est de toute façon plus compliqué pour une fille de faire sa place dans le milieu.”

Est-ce que tu as déjà pensé arrêter ?

“Je suis une vraie passionnée, je n’y ai jamais vraiment songé. Le seul moment de doute, c’était après la sortie du Vosgien 2003 avec Laurent où j’ai terminé à l’hôpital, c’est la seule fois d’ailleurs. Si j’avais eu peur en remontant dans une voiture, j’aurais arrêté. C’est vraiment la seule chose qui m’aurait écarté du baquet.”

Tu es la première femme à remporter une manche WRC depuis 1997 avec Fabrizia Pons. Est-ce que cela est important pour toi ?

“Oui c’est cool, je suis contente et je suis fière. Cela permet de souligner qu’il n’y a pas beaucoup de femmes en rallye, et encore moins dans les catégories prioritaires. Si cette victoire peut aider certaines femmes dans le milieu, tant mieux.”




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Jeff Boulet
Jeff Boulet
2 années il y a

1000 bravos à Isabelle pour cet authentique exploit. Débarquer à ce niveau et sur le Monte Carlo et gagner, c’est vraiment EXTRAORDINAIRE. Loeb revient avec une nouvelle copilote, ne s’est pas pas trop pris la tête avec les réglages, au feeling, “à la Loeb” quoi… et ça gagne! Isabelle 5O balais, Sébastien pas loin, ça remet aussi un peu “l’église au milieu du village”. Le rallye est une discipline ou l’humain et le talent sont fondamentaux. Loeb, ben c’est comme Ogier, on manque tous de qualificatifs pour résumer ce qu’ils accomplissent mais Isabelle vient de faire une entrée fracassante et… Lire la suite »

Martini29
Martini29
2 années il y a

Cet équipage me fait penser à des mercenaires “free lance” qui ont réussi leur coup ! Et ça, ça fait du bien, merci !